Pénurie mondiale d’argent : comprendre la rareté, la flambée des primes et les perspectives à venir

Alors que la demande d’argent métal atteint des niveaux records, le marché mondial fait face à une crise sans précédent. Le phénomène que certains prévoyaient depuis des années est désormais une réalité : la pénurie de métal physique s’intensifie et le fossé entre le marché papier et le marché réel se creuse dangereusement.

Mike Maloney, analyste reconnu et fondateur de GoldSilver.com, tire la sonnette d’alarme : « Le silver squeeze n’est plus à venir. Il est déjà là. »

Une pénurie mondiale en temps réel

De l’Australie au Canada, en passant par les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Afrique et l’Asie, les mêmes symptômes apparaissent : rayons vides, livraisons retardées et commandes en attente pendant plusieurs semaines.
Les principales institutions monétaires, telles que la Royal Canadian Mint et la Perth Mint, sont en rupture sur plusieurs produits phares. Chez SD Bullion, il ne restait récemment moins de 2 300 unités disponibles, tandis que Costco ne propose plus ni or ni argent dans l’ensemble de ses magasins de l’Ontario.

En Asie, la situation est encore plus alarmante. Au Vietnam, plusieurs revendeurs affirment ne plus avoir accès aux matières premières nécessaires à la frappe des pièces, signe que la tension touche désormais la production elle-même.

Quand l’argent devient “Unobtanium”

Mike Maloney avait déjà utilisé le terme “unobtanium” en 2008, lors de la crise financière mondiale, pour décrire la situation où l’argent devient pratiquement inaccessible, quel que soit le prix.
À l’époque, la demande avait tellement dépassé l’offre que les revendeurs de métaux précieux étaient placés sur allocation et que certaines boutiques avaient tout simplement cessé leurs ventes.

Aujourd’hui, la situation est similaire, mais plus profonde et structurelle.
La demande n’est plus seulement portée par les investisseurs individuels, mais aussi par les banques centrales et les institutionnels, dans un contexte de déficit d’offre chronique.

Maloney résume : « Ce n’est plus une crise logistique, c’est un déséquilibre structurel entre la demande mondiale et les capacités d’extraction et de raffinage. »

Les ETF sous tension : un signal d’alerte

Le marché des ETF adossés à l’argent, comme le célèbre SLV, montre des signes inquiétants de tension.
Les frais d’emprunt pour les positions vendeuses ont explosé, atteignant près de 10 %, tandis que les actions disponibles à la vente à découvert sont désormais inexistantes.

Ces données traduisent un stress croissant dans le système : la demande de couverture augmente alors que le sous-jacent physique devient rare.
Dans le même temps, le prix « spot » de l’argent — celui du marché papier — ne reflète plus la réalité physique.

Les investisseurs paient désormais jusqu’à 55 dollars l’once sur le marché réel, alors que le cours officiel se maintient autour des 30 dollars.
Cette décorrélation historique illustre la perte de confiance dans la capacité du marché papier à représenter la vraie valeur du métal.

Une demande en pleine accélération

Selon les données de BullionStar, en septembre, il y avait trois acheteurs pour chaque vendeur sur le marché mondial de l’argent.
Fait remarquable : cette frénésie d’achat persiste malgré des prix proches de leurs plus hauts historiques.

Les investisseurs ne cherchent plus à spéculer sur la variation des cours : ils veulent posséder du métal tangible, un actif réel et indépendant du système bancaire.
Cette ruée reflète la perte de confiance envers les monnaies fiduciaires et la recherche d’une valeur refuge durable.

Pourquoi les primes explosent

Les primes — c’est-à-dire le surcoût payé au-dessus du prix spot pour acquérir du métal physique — ont atteint des sommets historiques.
Dans certains pays, les revendeurs doivent désormais payer eux-mêmes plus cher pour obtenir du stock, avant même d’appliquer leur marge.

La cause principale ? La rareté du métal disponible.
Entre la fermeture temporaire de certaines raffineries, la demande institutionnelle croissante et les tensions géopolitiques qui affectent les flux logistiques, le marché physique est sous pression extrême.

Perspectives : la fin de l’argent “abordable” ?

Nous entrons dans une phase où les mots “disponible” et “abordable” ne veulent plus dire la même chose.
Même si l’argent reste coté autour de 30 dollars sur les marchés, il devient de plus en plus difficile de l’obtenir réellement à ce prix.

Cette situation pourrait déboucher sur un nouvel équilibre durablement plus haut, si les producteurs et les marchés dérivés ne parviennent pas à rétablir la confiance et la liquidité.
Dans ce contexte, Mike Maloney estime que la demande physique continuera de croître, notamment en période de faiblesse du dollar et de baisse des taux.

Conclusion : un métal plus précieux que jamais

L’argent, longtemps considéré comme “l’or du pauvre”, s’affirme désormais comme un actif stratégique majeur.
Face à la perte de confiance dans les monnaies, à la montée de l’inflation et aux tensions géopolitiques, la demande pour un actif tangible, rare et universel s’intensifie.

Comme le résume Mike Maloney :

“Vous pouvez imprimer des dollars. Vous ne pouvez pas imprimer de l’argent.”

La rareté structurelle de l’argent pourrait redéfinir le marché des métaux précieux dans les années à venir. Et pour les investisseurs, le moment d’agir — ou de rater le train — pourrait bien être maintenant.

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